Archive for the 'moisi' Category

L’alcool non ! L’eau ferracheunacheunarueuse… B’oui ! (a’ec la voix d’André).

C’est ça tu veux ?
Que je te raconte une histoire ?…
Un truc avec du vécu,
du drame, des passions et des déchirures ?
Des filles nues, aussi, tant qu’on y est ?
Très peu pour moi !…
C’est mal me connaître.
(Ce n’est pas du tout le genre de la maison).
Me drapant dans le manteau de l’indignation,
je préfère ignorer la demande, m’éloigner
et poursuivre l’aventure
au fond du jardin,
à l’abri des regards…
Là, où tu peux mettre en place un petit système secret
à la fois simple et sophistiqué
fait de trois bouts de chandelles
et de quelques ficelles,
un petit truc qui t’assurera
quelques belles fin de soirées en perspective
entre amis,
car crois-moi,
avec cette jaja,
t’auras toujours « dézamis »…
« Il n’y a pas que de la betterave ! » comme disait l’autre.
Mais d’abord…
Le seau de cerises,
amoureusement fermentées au fond du garage,
superbe moût de trois mois et demi
au goût légèrement amer.
Et nous voila partis,
mon pote et moi,
comme de vrais bouilleurs de cru
bravant l’interdit de la législation.
Rien ne manque :
la bonbonne de gaz,
le brûleur…
La flamme (l’avenir de l’homme)
sous le premier bidon de cuivre
(récupéré d’un vieux vaporisateur de vigne sur une brocante)
rien ne manque.
La vapeur s’échappe par un fin tuyau de cuivre
et passe par un alambic grossier
refroidi par le tanker de récupération d’eaux de pluie.
La magie des première gouttes d’acétone et de méthanol s’opère :
nous éliminons sans état d’âme les vingt premiers centilitres
et lorsque la température des vapeurs atteint soixante-dix-sept degrés
nous récupérons le précieux breuvage titrant à 80° d’alcool.
La suite est un jeu d’enfant,
le premier bidon refroidi et nettoyé du reste des cerises
nous repassons le liquide pur une seconde fois
pour l’affiner dans ses parfums…
Une petite mouchette téméraire a choisi de s’y suicider de la plus belle façon qui soit ;
comme nous la comprenons.
C’est alors que les flics ont débarqué !


Bien sûr nous avons passé la nuit au poste
et les pandores se sont régalés a’ec la jaja.
Quand ils ont été tous « bu »
on en a profité pour piquer les clés
et se barrer en douce.
Demain on fait de la patate !

La touque.

Par grande soucoupes,
flic-flac,
elles tombaient au hasard
criblant le béton du chemin
de flaques liquides :
sous les impacts répétés,
l’herbe pliait puis revenait à sa forme initiale,
la latérite explosait en poudre pâle
pour retomber rouge-brique.
Petit Diogène dans son bidon,
renversé pour ne pas prendre l’eau,
Wispra,cachée derrière la haie
n’en perdait pas une miette.
Blottie à l’abri de l’averse tropicale,
la tête au ras du sol,
humant les senteurs fugitives et particulières
des tropiques,
son oeil,
déjà photographique,
changeant la focale
elle se laissait envoûter par le spectacle.
Observant
silencieuse
les fourmis affolées
cherchant l’issue de leur terrier
entre les ruisselets tentaculaires
aux géographies incertaines.
Elle ne perdait pas de vue le jeu de cache-cache avec « les autres »
mais pour le moment elle jouissait
de la mise au point
sur les graminées, les insectes et les ruisseaux.
Le contraste du vert et du rouge.
Le martèlement des gouttes sur la tôle du fût.
La térébenthine de la mangue.
Ses sens gravaient,
à jamais.

Sûre qu’en rentrant,
avec sa robe trempée
et souillée de makala (*)
elle se ferait engueuler par sa mère :
– Fichue ! Ajouterait celle-ci
(toujours à dramatiser)
Flic-flac !
Elle se ramasserait sa paire de claques
sans broncher
et filerait se changer.

Sa satisfaction grandissait,
avec les fleuves.
Les autres,
trop couards,
ayant perdu,
devaient avoir mis le holà au jeu,
avec la pluie.
Elle pouvait rentrer à présent
ou se salir, encore,
et regarder la débâcle des Myrmidons.
Elle choisit de rester.

N’empêche !
Gontran aurait perdu.
Jamais ce nigaud n’aurait pensé à la chercher,
là, dans la touque servant au barbecue dominical.

Quinze ans plus tard,
à L’Archiduc,
Life On Mars passait dans les baffles ;
Bruxelles,
pour elle,
était en effet comme Mars.
Gontran,
devant elle et son mojito,
n’avait pas changé.
Toujours aussi empoté,
largué par sa meuf,
il s’entortillait dans un plan drague…
Pathétique.
« Flic-flac » pensa-t-elle.


(Pour Marion S.)

(*) charbon de bois.

Brownie reflex camera 6X6.

Crucifix au dessus du lit,
papier peint aux petits motifs bleus sur fond rosâtre.
Le tarif,
accroché à la porte,
mentait sur le standing de la chambre.
Deux repros passées au cyan depuis longtemps
donnaient une curieuse impression
aux champs de blé du batave à l’oreille coupée
vues sous-marines auxquelles ne manquaient
que des bancs de poissons en guise de corbeaux.
Sur la gauche,
façon batteur bourré
perdant le tempo,
baignoire,
bidet,
évier
et binoche scandaient en goutte à goutte irrégulier les couinements des ressorts du lit.
Le miroir ébréché de l’armoire,
piqué du tain,
renvoyait une image fêlée et vérolée du plus bel effet.
Wispra se demandait ce qui lui avait pris de la vouloir cette nuit dans un hotel de passe.
Son mec s’appliquait,
elle le notait,
ses pensées étaient ailleurs se demandant ce qu’elle pourrait tirer comme images de ce lieu.
L’autre limait toujours comme un âne.
Elle décida de s’y intéresser,
après tout,
c’est lui qui payait cette petite sauterie canaille.
L’affaire faite il fallu se rendre à l’évidence :
pas question d’imaginer que l’on ressortirait plus propre de cette salle de bain aux murs lépreux, à la faïence cariée et où la compagnie des eaux avait, depuis longtemps, rendu son tablier…
Le calcaire avait eu raison de la délicate mécanique des robinets et l’émail n’était plus qu’un souvenir.

Elle sortit le vieux Brownie reflex camera,
cadeau reçu à dix ans des mains de son père
son premier appareil photo,
lorsqu’il était enfant.
Passage de relai en somme.
.


.

Elle fit quelques six-six et deux ou trois polas.

Couleur mulot mort.

Solidaires de peur
de peur d’être seul
solitaires à deux
couleur grise
regard fixé sur cet horizon
sans surprise
des certitudes un peu tristes
des couples de trop longtemps
ils marchent
côte à côte.
Leur union « libre »
par conviction
plus très horizontale
non plus.
Rapides
faussement préoccupés,
pas s’arrêter
hésiter,
musarder
au hasard,
flâner,
non !
Ils marchent.
Les enfants ont fini leurs études à présent…
La thèse de la cadette
plus qu’une formalité.
Lambeaux de sentiments
entre eux
tristesse des gestes
dits de tendresse
n’ont plus rien des deux déchirés d’Orly
juste le moisi du mouvement.

Sur son Moleskine fraîchement offert, Wispra nota : « couleur mulot mort ».

La tempête de sable.


Rêves d’horizons
sécheresse annoncée
se perdant dans ces cieux.
(*)

ciel lavé et brillant
nuages en cavalcade
branches dénudées
(**)

(*)luc
(**)avec l’aimable autorisation de Madame de K.

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