Migumi et le yellowcake d’Ilunga.
Ito découpait
avec grand soin
ce don de l’océan ;
éliminant sans état d’âme
la chair foncée du dessus
la lame s’enfonçait
coupant sans compter
les endroits nerveux du morceau
les fines insertions des arêtes sur les côtés
afin de ne garder
que le meilleur
de ce filet de thon.
Quelques makis,
des sushis
et un émincé dans la pièce feraient un sashimi extraordinaire.
Sa fille se mariait aujourd’hui…
C’était sa contribution au buffet de la réception de ce soir.
Malgré la guerre
(depuis que l’empereur en avait décidé ainsi)
la vie était douce.
Quel beau lundi !
La journée promettait d’être inoubliable !
Ito était heureux
pour sa fille
(sa petite Migumi)
sa femme et sa famille.
Il devait penser à un haïku pour le discours.
Quoique jeune
son futur gendre
venait de s’engager.
Un bon Japonais.
Là haut
il entendait le vrombissement d’un avion
très haut.
Il décida de s’occuper du gâteau plus tard
(la cuisson du riz restait délicate)
et alla chercher une feuille de konbu.
…
…
Le même jour
à quelques milliers de kilomètres de là,
Ilunga,
pendant sa pause
buvait de l’eau,
beaucoup d’eau.
Il faisait chaud là dessous
à Shinkolobwe…
Ilunga ne savait pas ce qu’on extrayait de cette terre…
De sa terre.
Mais lis, plutôt :

(extrait de « Congo, une histoire » de D. Van Reybrouck).
…
Exit Ito.
