Quand le 6,35 ne fait pas l’essieu doux…

La balle entra sous la côte
traversa les chairs
pour continuer sa route
vers l’arbre
où elle alla se ficher
profondément dans l’écorce.
Il n’avait rien senti,
ou presque,
trop occupé à courir
comme un dératé
soupçonnant
seulement
un point de côté.
Derrière la voiture avait fait
demi-tour…
Il quitta le couvert du bois
et bifurqua vers la ferme,
à travers la prairie.
Sa vue se brouillait…
La bagnole s’était arrêtée au bord du fossé,
empêtrés dans les barbelés d’abord,
les deux mecs lui couraient
de nouveau
après.
Dans la grange une moto…
Il enclencha le kick à tout hasard
et jaillit de l’autre côté du U
des bâtiments
vers le village.
Surprise des deux dingues de la gâchette.
L’odeur des champs
fraîchement coupés
se mélangeait à sa sueur…
.
– Coupez ! hurla le réalisateur dans son mégaphone…
On la refait…
Pas assez rapide !
.
.
.
.
.

La cérémonie…


La statue est toujours à la même place depuis que…
Non, ce n’est pas ça !…
La d@me avait demandé un Lapsang à Wispra,
hier,
pour patienter…
C’est dommage que ce n’est pas la recette du thé noir ô z’épices k’alle veut !!!
Mais je vous entends déjà, dans les alpages, me dire…
– La recette du thé noir Ô z’épices ?…
Koass que c’est ?…
Comment ça marche ?
– Alaure ouala !
« Le blog à luc » ne recule devant aucun sacrifice
et décide de divulguer
« le secret de la recette du thé noir Ô z’épices »,
et ce,
pour quatre à six personnes…
Donc :
1 litre d’eau (au puits) tu prendras
1 bâton de cannelle tu brandiras
3 clous de girofle seront cherchés
3 baies de poivre de la Jamaïque (c’est loin).
3 gousses de cardamome
(bonne chance à Auchan !)
… Pilée, j’ai dit, la cardamome !
15 ml (une cuillère à sn’oupe, quoi !) de thé noir.
Tu feras mijoter les épices dans l’eau cinq minutes,
et porteras à ébullition
puis tu verseras sur le thé
(dans une théière chÔde et bouillante…)
Tu
laisseras
infuser
encore
cinq
minutes…
Et
puis
après ?
boire
j’imagine.

.

(Sab.)
.
Il y a du vent sur le Genmaïcha.

Le surlendemain…

Il s’installa comme un pacha
devant le film du même nom
et se mît en devoir d’explorer ses fosses nasales distraitement
quand le téléphone sonna,
il décrocha,
mettant fin à ses recherches troglodytes.
– …’llo ?
– Ce qui m’inquiète c’est l’énergie que tu mets à m’inventer des histoires…
(‘core cet emmerdeur, se dit-il, reconnaissant la voix…)
L’autre continuait…
– A fuir la réalité…
Le corps a été repêché par la fluviale,
ce matin…
Tu peux m’expliquer pourquoi ce type n’est pas dans le béton ?
Je t’avais dit pourtant !


A ce stade, les éléments étaient en place,
Wispra débarrassait la table d’à côté,
il commanda un café
– ça a marché votre vernissage avant-hier soir ?
– Pas méconte, oui… De bons échos et peut être un article.
– Vous avez eu du monde ?
– Pas mal oui…
Elle en avait marre de cette vie de serveuse et des pourliches dérisoires.
– Vous écrivez ?
– Oui, enfin j’essaye… C’est pas mon vrai métier…
– c’est comme moi.
Il se replongea sur son clavier.
Elle alla mettre la pression dans la machine


Cette nuit lui revenait…
Il n’aurait pas dû sous-traiter avec le polak…
Lança l’enregistrement du film…
L’autre allait lui tenir la grappe,
il le sentait,
le menacer sans doute…

Phasmes… «Quand voir, c’est perdre ».

Parfois on me demande ce que je lis ou relis en ce moment… Donc je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager ce petit bonheur, texte lu et relu… D’un auteur que j’aime retrouver de temps à autre.


(image source google).

.
« Bien sûr, l’expérience familière de ce que nous voyons semble le plus souvent donner lieu à un avoir : en voyant quelque chose, nous avons en général l’impression de gagner quelque chose. Mais la modalité du visible devient inéluctable — c’est-à-dire vouée à une question d’être — quand voir, c’est sentir que quelque chose inéluctablement nous échappe, autrement dit : quand voir, c’est perdre.
Tout est là.
(…)
Tel est le phasme, qui n’est pourtant pas un fantôme. Regardant son décor, le “fond” vide d’animal, j’ai dû comprendre à un moment — moment où l’incertitude s’effondra, mais avec elle toute certitude aussi — que la vie de cet animal, le phasme, était ce décor et ce fond mêmes. J’ai peine à m’expliquer. D’habitude, lorsqu’on te dit qu’il y a quelque chose à voir et que tu ne vois rien, alors tu t’approches : tu imagines que ce qu’il faut voir est un détail inaperçu de ton propre paysage visuel. Voir les phasmes apparaître exigea le contraire : dé-focaliser, s’éloigner un peu, se livrer à une visibilité flottante, voilà ce que j’ai dû faire à peu près par hasard, ou d’un mouvement anticipant la peur. Mais les deux pas de recul me placèrent d’un coup devant l’évidence effrayante que la petite forêt du vivarium était elle-même l’animal censé s’y cacher.
(…)
Le phasme a fait de son propre corps le décor où il se cache,
en incorporant ce décor où il naît. »
.
(Phasmes – essais sur l’apparition de Georges Didi-Huberman).

Maki’s story.

Il s’était farci des courants chauds,
des courants froids,
des tempêtes,
l’avait rencontrée sur un banc,
courtisée,
demandée à ses parents.

Avait-elle rejoint la source du fleuve?…
Là où l’eau est calme et pure
où l’herbe et le cresson
caressent le fil
de l’eau des rives
de leurs têtes lasses…
Il en avait encore un souvenir lointain.
Elle devait être en train de mourir d’épuisement,
la pauvre
après la ponte de leurs petits.

Tout ça pour terminer débité
en blinis,
makis
et sushis
dans ce vernissage qui n’en finissait pas de finir.

Le traiteur avait eu du nez en choisissant ce saumon dans l’arrivage.
Un mâle fringant et sauvage,
pas trop gras et bien raide.

.
Duschmoll qui n’avait plus mangé depuis le matin,
approcha la main des blinis devant lui et s’en goinfra
ainsi que d’autres zakouskis…
Le vernissage de Wispra était décidément généreux
en cacahuètes et couillonnades
mais le mousseux moyen et tiède
c’est pourquoi Duschmoll s’était rabattu sur le rouge…
Honnête le rouge, sans plus.

.
La photographe passa devant l’écornifleur,
en piquant au passage un sushi…
La chair en était rose et tendre,
le riz vinaigré et sucré à point ;
un jour elle irait là-bas,
faire un reportage sur la migration
de ces animaux fascinants
qui remontaient les courants et les chutes
pour les amours et la ponte.
.


(Flickr: aroid).

.
Duschmoll s’approcha d’elle…
Elle flaira le minable mais s’habilla d’un sourire…
Vernissage oblige.

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