Archive for the 'correspondance' Category

Si mes calculs sont bons…

Bien sûr vous deviez vous en douter,
ce long silence des vacances, cachait quelque chose !
(Dame ! Depuis le temps qu’on se connait !)
La raison en était simple,
pourtant…
Foin des vacances !
J’ai planché,
tout l’été,
sur une nouvelle machine…
Une sorte de Lulucoptère revisité…
Un engin permettant de voyager dans le temps !
Pour l’instant je n’en suis qu’aux essais…
Là, je règle sur l’an 3.150 ap. J.C.
vers onze heures du matin…
(à la louche !)
pour voir…
Avec un peu de chance
ce sera l’heure
de l’apéro
(si les choses n’ont pas bougé).
J’y vais,
je reviens et
je vous raconte.
Quoi ?
Une combinaison spéciale ?
Nan, pas besoin !
En principe c’est l’été !
.

Le « Lulu-temps-coptère ».

(Aline Burton, ph. de A. Moons).

L’humilité est la première chose que tu apprends dès le début… (V).

Matin !
Quelque chose s’est tordu dans la carcasse ;
impossible de se relever.
Il amorce doucement un tour sur lui-même
prudemment se retrouve sur le ventre
et amorce un lent demi-tour,
à plat,
vers la sortie,
doucement…
Maudissant la largeur de cette tente.
Le zip de la fermeture éclair tiré sans bruit
il n’ouvre que le bas,
(plus haut impossible.)
Les lombaires lui scient le dos
Se repte, péniblement, au travers de l’ouverture
La toile se distend pour laisser place à la tête
puis les épaules passent,
le reste du corps avec ;
la rosée lui mouille le ventre.
– c’est un garçon se dit-il en lui-même, comme pour dédramatiser.
La canadienne vient d’accoucher d’un charmant bambin d’un mètre quatre-vingt.
Un peu gauche, c’est vrai.
Il ramène ses genoux sous lui
puis se redresse à quatre pattes
et marche,
toujours dans la même position,
vers l’arbre le plus proche,
distant de cinq longs mètres.
Son vélo y est adossé.

Prendre cet arbre,
le considerer,
s’y appuyer,
remonter le long de son tronc,
s’aidant des mains,
tout doucement,
tromper cette ceinture de douleurs ;
enfin,
épuisé,
dans la position qui caractérise tout bipède normalement constitué,
hébété,
il reste un long temps contre le platane,
« son » platane désormais.
Considère les alentours,
la brume sur les champs ;
belle, la brume.
La pâle lueur du soleil ;
pâle, le soleil.
Le silence et sa fraîcheur.
Froid.
Il contourne le tronc à pas de sioux,
défait le cadenas
restant droit,
poliment,
puis,
tenant le guidon et s’appuyant sur la selle,
se met en devoir de faire le tour du camping d’un pas de sénateur,
le regard bloqué vers l’horizon…
Se félicitant de toujours se lever tôt…
Il est cinq heures moins le quart…
Tout est calme,
endormi…
Pas de témoin !
La roue-libre du bexon,
guillerette,
produit son petit son de roulement à bille.
Contente.
Quelques graviers craquent et croquent sous ses pas,
une feuille morte de sa tige joue crécelle
un instant dans les rayons
puis abandonne,
voyant que ça ne fait pas rire.
Le dos se soulage…
Se redresse peu à peu.


Se demande comment il fera les quatre-vingt kilomètres de la journée dans cet état.

(N’importe qui peut l’improviser un jour de pluie).

Hier, nous cherchions une recette
pour un petit thé chez des amis
(je dis « nous » majestatif
car j’ai envie du majestatif aujourd’hui…
après tout, on a que le bien qu’on se fait !) (*)
Nous cherchions donc,
quand nous sommes tombés
sur ce merveilleux livre de cuisine d’Alice Toklas
Après avoir éliminé la crême brulée
(nous en avons mangé avant-hier soir)
nous pensons faire cette recette, car,
comme Alice le dit si bien :


« … Une euphorie et de grands éclats de rire, des rêveries extatiques et une extension de la personnalité sur plusieurs niveaux simultanés sont à prévoir avec satisfaction.
Presque tout ce que Sainte Thérèse a fait, vous pouvez le faire encore mieux si vous acceptez de vous laisser aller à un évanouissement réveillé… »






(*) Nous pensons que le haschich de la (très longue)préparation du gâteau n’est pas pour rien dans l’emploi du majestatif.
Il a fallu goûter avant, pendant et après.

Limbe II (suite).

Les anglais avaient importé toute l’Inde,
dans ce petit coin perdu
entre Douala et Victoria.
Les senteur âcres et nauséabondes
de cette gigantesque plantation d’hévéas
prenaient aux narines ad nauseam
pendant quelques kilomètres
avant d’arriver dans ce havre de paix
du « club de la locomotive »,
appelé comme ça à cause de la vieille loco
rouge et rutilante de tous ses chromes
trônant fièrement sur deux rails
au milieu du parc entourant la piscine.

(Ici, image d’une loco rouge…
Mais comme c’est un dénommé Pluplu
qui ne me l’a pas rendue,
on s’en passera)
fin de la parenthèse.

L’après-midi,guiness
dans l’atmosphère confinée
de la pièce jouxtant l’auvant en béton,
où ces ripailles avaient eu lieu,
l’odeur lourde, grise et froide des cigares
mélangée à celle de la Guinness tiède
nimbait les hommes.
Ceux-ci,
séparés des femmes,
jouaient au snooker.
La première leçon de ce jeu
(qui ne doit rien à l’Asie)
c’est de se faire battre à plate couture,
sans broncher,
par l’autre,
et de tapoter doucement le bord de la table,
du plat de la main,
lorsque le coup est magistral.
Si et seulement si le coup est magistral…
(Faut pas pousser quand même !)
Le salon ne recelait pour tout meuble
que cette table au tapis vert et magique
où, la bille blanche, après une longue course lente
venait s’entrechoquer douce et calme à d’autres billes
dans ce bruit si particulier à l’ivoire,
empochant tantôt une rouge
tantôt une couleur, noire ou rose de préférence.
Le bruit sec, métallique et mat du marquoir,
comme pour répondre à l’infinie douceur des propos du tapis,
affichait les points.
Les autres joueurs observant,
flegmatiques,
le break de l’adversaire
frottaient calmement,
à la craie bleue,
le procédé de leur canne.
Au fond de la salle, un autre groupe de quatre,
lui,
jouait aux « darts »…
Roulant la fléchette longuement entre les doigts et
fichant dans le liège de la cible,
à coups sûrs.
Là aussi, la Guinness servait de carburant.



Au milieu du Sud-Ouest Cameroun les dimanches après-midi étaient longs.

Limbe I

Moyennant forfait tu avais :
riz basmati
papadams
patates douces
cacahuètes
bananes plantins
noix de coco râpée-grillée
tranches d’ananas
chutneys de mangue
de tomates vertes
haricots en sauce
et puis des viandes
du bœuf
de l’agneau
du poulet
tu choisissais à volonté
Ce curry du dimanche était délicieux.



(à suivre).

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