Archive for the 'collage' Category

Sa mère avait gardé, malgré tout, une certaine classe et portait encore chic.


(copyright: Anna Dada).
.
Aux yeux de sa mère
(très collet monté par ailleurs)
il était devenu,
ce qu’on appelle aujourd’hui,
un véritable « geek ».
il est vrai qu’il en perdait, parfois, le boire et le manger,
mais dans le fond avait-il vraiment changé autant qu’elle l’entendait ?
Il restait le petit fiston à sa maman,
faisant les courses,
s’occupant de ses cadets,
passait le balai volontier,
avait très peu d’amis et le plus souvent
restait à la maison, dans sa chambre,
tranquille…
Il tenait son petit blog contant ses aventures imaginaires,
il en faisait d’ailleurs des livres…
Livres qui se vendaient bien du reste:
« what else » aurait dit son idole…
Il alla se reverser un café en y pensant et se remit au travail.
Décidément, cette nouvelle invention, lui prenait tout son temps.
Mais chut ! C’était un secret…
Le monde allait bientôt savoir.

.

Sur ses traces en ce jardin.


.
Des langues de ruisseaux et de rivières rougeâtres
s’allongent en affluents arachnides au sol.
La latérite, assoiffée, boit goulûment les eaux usées.
A la limite de la nausée
l’odeur des plumes mouillées
ébouillantées
arrachées
en cadence
par poignées
scandent le matin.
Ouvrir sous le croupion
éviscérer…
Les intestins glissent
dans d’improbables entrelacs grisâtres se confondants avec la pierre.
Cous, cœurs, foies, gésiers…
Vider les cailloux et le grain…
Avant de les ranger au fond de la cavité thoracique
assainie de ses boyaux.
Parfois, avec son chapelet allant crescendo,
une jeune pondeuse y passait, par erreur,
avec au bout deux ou trois oeufs formés,
presque prêts à sortir…
Il seraient pour la pâtisserie…
En ce samedi matin
Cinq, dix, quinze, vingt
on avait vidé une trentaine de poussins
plus une poule…
Pour la moambe du lendemain.
Les ailes croisées dans le dos
les pattes coupées et rentrées dans l’incision du fion…
Pour honorer la commande.
Les poulets,
rangés côte à côte,
attendaient le client.
C’était il y a longtemps.
.

.
Récompense des plus grandes plumes
pour une coiffe de chef indien
… Le duvet irait dans des coussins.


.
C’est à ça aussi que ce jardin me faisait penser.
Pourquoi je raconte ça ?
.

Vendredi tu aurais eu quatre-vingt-huit ans.
Ne crois pas que je l’oublie…

L’heure des vêpres.


(Alice).
.

L’enfant, coudes collés à la nappe en plastique, n’en perd pas une miette.

D’abord les lunettes qui forcent le respect ordinaire. Grand-Mère les enlève et perd son air têtu.

Plus vulnérable, elle se penche sur l’évier, remplit une tasse ébréchée et fait rouler une gorgée d’eau entre ses joues. Elle jette deux grosses pastilles qui font des remous dans le récipient, puis le dentier petit navire ; la fillette battrait presque des mains.

Grand-Mère s’en prend maintenant au chignon parfait. D’un filet délicat sortent comme d’un chapeau claque, peignes courbés, épingles, barrettes d’écaille, élastique à crochet, un coussin de cheveux de nylon, tout un attirail qu’elle dépose en chirurgien sous le fenestron, près du récipient où s’ébroue la trentaine de dents aux gencives framboise.

Tombent alors en bas des omoplates de longs fils poivre sel, et la fente des yeux étire dessous un trou qui veut sourire. Elle défait pièce par pièce son uniforme, désamorce les courtes bretelles attachées à la culotte, roule les bas en s’amenuisant, rendue flottante dans une combinaison à jours saumon.

Ablutions.

Devant le miroir qui gondole et réfléchit son nouveau visage, elle disparaît dans une tunique de coton, dos tourné à la petite attablée aux silences.

En place de l’austère mamie, une indienne lunaire noue sa maigre chevelure dans le cordon de cuir qui pend le jour à la crémone.

Mon-petit-or-il-est-temps-de-monter-te-coucher,

Les sons élimés cahotent du fil des lèvres sans émail

et l’enfant chuchote

Anou-tishou-shawani-d’abord-à-toi

Sans crainte elle prend sa nouvelle idole par la main et elles s’acheminent vers l’alcôve sacrée où s’épate la fameuse bombance, l’édredon qui en appelle aux plongeons

Pas-sur-le-lit-tu-vas-m’écraser-les-duvets

La meringue de plumes parée de tissages exhale le schnaps, l’eau de mélisse et les onguents musqués dont la vieille dame se frotte la poitrine par les nuits oppressantes. C’est une planète aux oreillers joufflus, volantés, ruchés, smockés, brodés, quiltés, une chasse gardée. Un ventre d’amidon que l’on rêve de trouer.

L’aïeule soulève un nombre d’or de couches ouatées avant de s’assoir au bord du lit. Entonne une prière juvénile et triste qui fait se retourner la petite fille pour voir qui est venu.

Elle prie : Bon Dieu rends-moi croyante, montre-moi ton ciel, donne-nous la paix, protège les miens.

L’enfant ne doute pas que les messages arriveront à l’intéressé, se presse d’opiner pour que cesse la litanie et revienne une paix familière. La mort rôde.

Finalement, Grand-Mère relève un visage lissé. Lui pose un baiser sur la tempe, la serre entre ses bras. Un petit peu trop fort.

Elle engouffre ses pieds pâles puis sa robe de nuit dans l’igloo.

Couche sa tête sur le coussin, imprimant un creux parfait.

Bonne-nuit-Blanche-Neige

.
(Paru chez Christine Jeanney
dans le cadre des « vases communiquants »,
il y a quelques temps de cela,
ce texte est de Kouki Rossi :
je tenais à le partager avec vous,
car je l’aime bien…
Quoi ?
Ben, le texte pardi !…
Pas kouki !…
Quoique !;o)

Le Barbecue Argentin.


(crédit photo : flickr)
.
Ce week-end, je pars faire deux ou trois petits essais avec mon nouvel engin…
Je m’arrêterai certainement pour un petit barbecue entre amis à « Bouenoss A’êresss »
invité, que je suis, par des Argentins…
D’abord il faut que je mange, car, il faut que vous raconte…
Ils ont vraiment une drôle de façon de faire le barbecue là-bas.
D’abord tu viens pour la demi de onze heure croyant benoîtement que si on mange vers treize heures tu ne dois pas prendre de petit-déjeuner… Donc l’apéro se passe, les chips se grignotent, on se ressert… Il y a quelques cacahuètes qui font les frais de la conversation à bâton rompu… L’estomac se creuse, la tête commence à tourner… Cela fait longtemps que le guacamole n’est plus qu’un souvenir verdâtre au fond du bol… Et on se rapproche insensiblement du lieu de cuisson.
Quelle cuisson ?…
Rien n’est fait.
Tout commence.
On s’enquiert de quelques parpaings et d’une vieille grille un peu bancale pour accueillir la barbaque qui repose.
En fait, çà, c’est que tu crois… Il faut savoir qu’en Argentine, le barbecue est un secret qui se refile de père en fils… Il faut d’abord planter une forêt, laisser pousser les arbres, couper les plus belles branches puis les faire brûler à petit feu pour en faire du charbon…
Le boeuf ?
Pareil !…
Tu prends un bon reproducteur, tu lui présente une vache…
Ils font leur affaire et le veau pousse…
A maturité tu choisis un bon morceau dans la bête,
tuée préalablement (parce que ça fait mal sinon) et… Merttt’ !
J’ai oublié l’huile…
Tu prends un bel olivier, les meilleurs fruits tu cueilleras…
Enfin je ne vais pas vous faire le coup de la cueillette des olives en Haute-Provence…
Pour bouter le feu de simples allumettes suffisent.
(Si tu n’en a pas, malheur !… Il faut repartir dans le forêt, de tout à l’heure et passer par la mine de souffre pas loin, etc.)
Voila, il est seize heures trente environ, le vin continue de remplir ton verre, les canettes s’entassent dans un coin du jardin, les chips… Quelles chips ?… Il n’y en a plus depuis trois heures, voyons !… Donc plus que légèrement gris tu commence parler à l’arbre du fond, appuyé d’une main au tronc, tout seul, pendant que tu lui pisses sur les racines, …
Digne.
Le temps se rallonge, la conversation des amis s’estompe au loin dans un bizarre baragouin…
Le chant des baleines se mêle, on ne sait trop comment au brouhaha général…
Puis tu reviens vers les parpaings et le feu sous la grille…
Tu couves du regard ce qui pourrait te nourrir…
D’ici deux ou trois heures.
Bref, vers vingt heures, tout le monde est « ami » ou « copaing »…
Et à pleines mains la salade passe direct du plat à la bouche sans passer par l’assiette,
la barbaque est dépecée directement sur l’os de la bête…
T’embrasses bêtement ta voisine alors que c’est un homme, tu fais les yeux doux au chien qui lorgne ton T-bone…
Et… Non, mais c’était super-sympa !…
La prochaine fois je prendrai un petit déjeuner…

C’est pas tout ça, faut que j’y aille,
ils doivent m’attendre pour…
Planter la forêt.
.
(Pour Guadalupe, Joaquim, Facundo and c°, amicalement.)

C’est embêtant ça…


.
Ma longue absence s’explique par le fait que j’étais
dans la remise du fond du jardin
en train d’inventer de nouveaux véhicules à propulsion…
Là bas, point d’internet qui tienne…
L’invention avant tout !
Les nordis au placard,
facebook au milieu !
Mais,
car il y a un « mais »,
je ne sais encore lequel choisir et développer
pour retourner à Honoluluc…
Et le plus vite possible, encore!
(il fait trop moche, ici…
Le froid, la bise, le mouillé…
Tout ça quoi !…
Vous, qui n’habitez pas dans le Nord,
ignorez évidemment les aléas de ce tout petit royaume trempé dans la soupe du waterzooïe communautaire)
Auriez-vous des idées sur le modèle le plus efficace
pour ces « destinations où jamais il ne pleut »
comme disait Georges…
Je vais reprendre du tapioca et guetter vos suggestions.
.

« Page précédentePage suivante »