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A partir des restes de repas laissés dans leurs assiettes par les clients
elle se fait comme une astrologie des convives
Les nappes investies de graffitis et de taches l’inspirent
Tout de même les gens sont sales !
Comme souvent au restaurant lorsqu’on attend son plat la nappe en papier sert d’exutoire à une adresse, un plan ou encore à des jeux comme des défis de dessin dans les taches de vin
le papier-palette en somme…
La nappe, l’assiette investies des ingrédients multicolores des salades et des sauces… Sans oublier les épices la font rêver.
En lousdé le soir, quand elle rentre, elle emporte deux ou trois nappes (les plus inspirantes) qu’elle a pris soin de ne pas trop chiffonner en débarrassant, et, les maroufle sur une toile ou un panneau de MDF… Comme palimpsestes préliminaires à ses peintures.
De ses oil-bars elle repart sur ces traces laissées par les clients, comme s’il s’agissait au travers des souillures d’en retrouver un portrait en creux.
Des différents légumes, viandes et/ou poissons qui composaient le plat elle s’aventure dans son imaginaire et s’adonne à ses délires multicolores new-age.
Si d’aventure un mec lui demande ce qu’elle peint pour tenir à l’écart l’intrus potentiel elle répond avec un certain cynisme:
– de l’alimentaire.
Elle ne sait pas encore trop quoi en penser ni en faire vu qu’elle se sent plus peintre qu’illustratrice.
…
A partir des restes laissés par les clients dans l’assiette Wispra s’en fait une astrologie.
Taches, graffitis, souillures et maculas l’inspirent…
Souvent les gens sont sales se dit-elle…
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Il interrompit sa ré-écriture, se leva de sa chaise, pris son manteau et son chapeau et alla régler au comptoir en laissant un pourliche conséquent à la serveuse avant que de se fondre dans la pluie qui comme si elle l’avait attendu, venait de reprendre mouillée plus que jamais…
Content de sa petite nouvelle commencée au resto, son papier prenait forme :
il le terminait ce soir, sur son ordinateur, malgré sa journée chargée.
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Cependant au snack du passage,
où elle bosse, pour payer ses études,
la serveuse prit un grand soin à photographier la place du monsieur qui venait de sortir…
Elle prend des photos des restes de repas.
Son SX70 acheté trois fois rien sur une brocante de Temploux,
la suit partout et lui coûte une fortune en films chinés ça et là sur Ebay…
Elle trafique,
avec l’iphone piqué à son copain,
un autre cliché et débarrasse.
Dans le juke-box Aznavour.
Elle sourit.
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En pensant à l’album «Anita» de S. Ricci qui tournait, déjà, autour des restes de tables.